La forêt de marbre, Théo Durrant

theo durrant, la forêt de marbre

Aux très regrettées Néo, Nouvelles éditions Oswald, paru aussi en poche, non réédité à ce jour.

J’ai plongé dans ce polar nerveux sans avoir su que je rencontrerai au fil des pages la plume de plusieurs auteurs, et je ne l’ai pas deviné car chacune se font dans l’autre, chacune s’est mise au service de l’histoire ; le roman n’est ni égal, ni morcelé, ni différemment stylé d’un chapitre à l’autre. Voilà la preuve que ce genre d’exercice, récurrent dans les ateliers d’écrire, peut produire de très belle œuvre concrète et cohérente.
Mais intéressons-nous plutôt à l’histoire… Mêlant savamment vieilles histoires de famille, préjugés de la société, traumatisme de la grande guerre, héroïsme ordinaire et amour filial passionné, ce roman est du genre qu’on prend en main et qu’on ne quitte plus jusqu’à la dernière page. Bien sûr, il joue de notre corde sensible, la petite victime est innocente et le compte à rebours toujours présent à l’esprit, mais les auteurs ont su donner du relief à tous les personnages, de l’humanité, des vices et des beautés très humaines qui donnent de l’ampleur et du mystère à leurs actes et leurs réactions. Même le héros est égratigné et sa quête désespérée jamais plus réelle et angoissante que lorsqu’on devine qu’elle est le fruit d’une vengeance causée par des circonstances dont il n’est pas entièrement innocent.
Mais la chute n’en reste pas moins réussi et de nombreuses révélations finales permettent de maintenir le suspens et l’intérêt jusqu’au bout.
Le personnage le plus intéressant restera pour moins l’impassible secrétaire, loin du stéréotype de la midinette amoureuse de son patron, qui le suit et l’épaule dans sa quête pour la simple raison que c’est ce qu’il faut faire…

Le Volcryn, George R. R. Martin

 

Le Volcryn de GRR MartinParu chez ActuSF éditions ce court roman du renommé Georges R.R. Martin (auteur de la saga fantasy Le Trône de fer) nous donne en fait à découvrir deux intrigues à fois parallèles et intimement intriquées. En premier, il y a la quête des volcryns, objet de recherche, de questionnement culturel et scientifique, pour lesquels l’équipe de Karoly s’enfonce dans des régions reculées de l’espace, dans l’espoir d’un premier contact avec ces entités. Étonnamment, ces derniers ne sont point perçus comme de potentiellement dangereux par les missionnés, qui nous apparaissent alors, à nous, lecteurs du 20e siècle, curieusement étrangers, délivrés de la peur primaire de l’autre, de la différence.

 

Pourtant ce premier constat est un leurre, en quelques pages, l’auteur nous montre que ce n’est pas l’enthousiasme qui prédomine dans le vaisseau, mais bien la suspicion et la crainte. Celles-ci se cristallisent dans le mystérieux commandant de l’Armageddon avec lequel les autres passagers n’ont de contact que grâce aux interphones et à l’hologramme apparaissant aux heures de repas. C’est là les bases de la deuxième intrigue jouée dans le théâtre du vaisseau : Qui est le commandant ? Quelle est sa véritable nature ? Pourquoi refuse-t-il de se montrer ou de laisser accès à certaines parties du vaisseau ? Le roman acquiert ainsi sa véritable forme narrative : un dangereux huit-clos qui va voir cet échantillonnage d’humains surdoués, hautement spécialisés, scientifique, xénobiologiste, cybertechnicienne, télépathe, linguiste, au prise avec des aléas triviaux : l’incapacité à communiquer, la curiosité, la promiscuité, la paranoïa, l’égotisme, la jalousie sexuelle, les préjugés.

 

Si l’auteur n’a rien fait pour rendre ses personnages attachants, les traitant sans complaisance aucune, qualifiant certains de laid, de sales, de gros… il parvient néanmoins à provoquer un peu d’empathie chez le lecteur par un effet flouté de miroir ; on souhaite évidement que l’humanité soit préservée. S’il est fait mention de relations sexuelles entre les protagonistes, celles-ci ne sont pas montrées (fausse pudeur ? habituelle censure américaine ?), rabaissées à des pratiques obligées, hygiéniques ou sanitaires. Plusieurs personnages se dégagent de la masse à la toute fin du récit, mais je pense que le format « petit roman » ou « novella » était décidément trop court pour espérer donner une vraie épaisseur aux nombreux personnages de cette histoire.

 

En dehors des personnages, reste le contexte, les histoires entremêlées évoquées ci-dessus, la richesse de certains concepts propres à la science-fiction et une narration plutôt tournée vers l’action, avec des rebondissements et un style dynamique, mais sans notable élégance, un peu moins fonctionnel pourtant que ce qu’on trouve trop souvent dans les romans du genre.

 

Un mot encore sur l’objet livre : C’est un petit format presque carré, agréable à tenir et à parcourir. La couverture mat lui confère au toucher un aspect particulier, la maquette intérieure est très simple, mais la relecture a été de qualité, je n’ai guère remarqué que quelques espaces manquants.

Du même auteur, je vous recommande la lecture du recueil Le roi des sables du même auteur et plus particulièrement la nouvelle éponyme qui conjugue avec brio et la même intensité cette fois : style, richesse du contexte SF et psychologie des personnages.

 

Imago d’Estelle Valls de Gomis en pré-commande

Fin octobre, paraîtra aux éditions Sombres Rets, un ouvrage que j’attendais avec impatience. Il s’agit de Imago, Les Gentlemen de l’Etrange : tome 2 de Estelle Valls de Gomis. La belle et talentueuse Estelle a donc repris sa plume pour nous narrer sans pareille les aventures de ces deux messieurs victoriens, amateur de mystères, d’absinthe et d’aventure. Leurs compagnons (Arpad le vampire, Ernest le souriceau géant…) sont très intéressants et attachants. Dans ce tome-ci (qui peut être lu indépendamment du premier ; un résumé nous y aide) l’aventure est double, extérieure et intérieure, elle convie à lever le voile sur l’étrangeté du monde créé par Estelle et à transpercer celui de l’âme de l’un de ses héros : Wolfgang Bloodpint. Mais le titre, Imago, nous donne déjà quelques indices…

La couverture et les illustrations intérieures ont été réalisées par l’auteur non moins habile avec un pinceau qu’avec des mots.

Toutes les informations sur ce roman sont disponible sur le site des éditions Sombres Rets. On peut notamment lire les premières pages.

Le livre est en pré-commande jusqu’au 31 octobre, ce qui permet de l’acquérir à 13€ tout rond, les frais de port et un marque-page sont offerts.