Le Volcryn, George R. R. Martin

 

Le Volcryn de GRR MartinParu chez ActuSF éditions ce court roman du renommé Georges R.R. Martin (auteur de la saga fantasy Le Trône de fer) nous donne en fait à découvrir deux intrigues à fois parallèles et intimement intriquées. En premier, il y a la quête des volcryns, objet de recherche, de questionnement culturel et scientifique, pour lesquels l’équipe de Karoly s’enfonce dans des régions reculées de l’espace, dans l’espoir d’un premier contact avec ces entités. Étonnamment, ces derniers ne sont point perçus comme de potentiellement dangereux par les missionnés, qui nous apparaissent alors, à nous, lecteurs du 20e siècle, curieusement étrangers, délivrés de la peur primaire de l’autre, de la différence.

 

Pourtant ce premier constat est un leurre, en quelques pages, l’auteur nous montre que ce n’est pas l’enthousiasme qui prédomine dans le vaisseau, mais bien la suspicion et la crainte. Celles-ci se cristallisent dans le mystérieux commandant de l’Armageddon avec lequel les autres passagers n’ont de contact que grâce aux interphones et à l’hologramme apparaissant aux heures de repas. C’est là les bases de la deuxième intrigue jouée dans le théâtre du vaisseau : Qui est le commandant ? Quelle est sa véritable nature ? Pourquoi refuse-t-il de se montrer ou de laisser accès à certaines parties du vaisseau ? Le roman acquiert ainsi sa véritable forme narrative : un dangereux huit-clos qui va voir cet échantillonnage d’humains surdoués, hautement spécialisés, scientifique, xénobiologiste, cybertechnicienne, télépathe, linguiste, au prise avec des aléas triviaux : l’incapacité à communiquer, la curiosité, la promiscuité, la paranoïa, l’égotisme, la jalousie sexuelle, les préjugés.

 

Si l’auteur n’a rien fait pour rendre ses personnages attachants, les traitant sans complaisance aucune, qualifiant certains de laid, de sales, de gros… il parvient néanmoins à provoquer un peu d’empathie chez le lecteur par un effet flouté de miroir ; on souhaite évidement que l’humanité soit préservée. S’il est fait mention de relations sexuelles entre les protagonistes, celles-ci ne sont pas montrées (fausse pudeur ? habituelle censure américaine ?), rabaissées à des pratiques obligées, hygiéniques ou sanitaires. Plusieurs personnages se dégagent de la masse à la toute fin du récit, mais je pense que le format « petit roman » ou « novella » était décidément trop court pour espérer donner une vraie épaisseur aux nombreux personnages de cette histoire.

 

En dehors des personnages, reste le contexte, les histoires entremêlées évoquées ci-dessus, la richesse de certains concepts propres à la science-fiction et une narration plutôt tournée vers l’action, avec des rebondissements et un style dynamique, mais sans notable élégance, un peu moins fonctionnel pourtant que ce qu’on trouve trop souvent dans les romans du genre.

 

Un mot encore sur l’objet livre : C’est un petit format presque carré, agréable à tenir et à parcourir. La couverture mat lui confère au toucher un aspect particulier, la maquette intérieure est très simple, mais la relecture a été de qualité, je n’ai guère remarqué que quelques espaces manquants.

Du même auteur, je vous recommande la lecture du recueil Le roi des sables du même auteur et plus particulièrement la nouvelle éponyme qui conjugue avec brio et la même intensité cette fois : style, richesse du contexte SF et psychologie des personnages.

 

Mes lectures SF d’août 2009 : La vérité avant dernière de Philip K. Dick

Je n’ai jamais encore été déçue par un Dick, mais selon Cyril (qui les as tous lus, ou presque) je finirai par tomber sur un qui me plaira moins, peut-être l’un de ceux de sa période « sous influence » très noire et barrée. En attendant, la vérité avant-dernière restera longtemps dans mon top personnel des meilleurs romans SF. Voici quelques-unes de mes impressions ( il y aurait tant à dire ! ) :

 

D’abord ce qui m’épate chez ce monsieur c’est son efficacité première à nous présenter la situation, l’univers, en un minimum de pages et de temps. Sans lourdeur, ni déballage, vous voilà plongé malgré vous dans l’histoire, sans qu’un seul concept ou bizarrerie inhérente au background ne soit vraiment difficile à avaler.  Ensuite, ce que je vais dire va ressembler à un cliché mais ses personnages sont vraiment convaincants et même les plus neutres ou les plus ambigus finissent par nous séduire et avoir notre sympathie sinon notre intérêt. Dick transforme monsieur tout le monde en héros sans le départir de son humanité et de ce qui fait que la personnification opérera tout de même pour le lecteur.

Ensuite, au risque de dévoiler certains pans de l’histoire, je dirai que ce roman quoique teinté de la paranoïa habituelle de l’auteur s’articule néanmoins sur un axe profondément positif : la quête de la vérité. Car l’histoire (le texte) et l’Histoire concernant cette autre Terre prend appui sur un mensonge véritablement énorme qui permet à un minorité de jouir d’un confort divin tandis que la masse trime inconsciente d’avoir la place du dindon, de la farce et du four pour faire cuir le tout.  Ca vous rappelle quelque chose ? Moi, oui, ça doit être pour ça que la paranoïa de Dick ne me gène pas….

Il y a quelque chose d’humaniste aussi, comme chez certains personnages qui vont finalement renier leur position pour faire éclater la vérité et c’est là que Dick s’en tire parfaitement car ces mêmes personnages sont pleins de contradictions et sont victimes tout autant de leur lâcheté que de leur élan chevaleresque. C’est comme dans la vie, même les bonnes actions se payent et les places sont chères au Panthéon.

Je passe sur toutes les trouvailles SF concernant les avancées techniques futuristes, les clins d’oeil historiques ou cinématographiques, c’est toujours de bons goûts, bien documentés et bien trouvés, pour finir sur les nombreux « messages » de ce récit. Tant politiques, écologiques que sociaux, notamment dans le fait que les puissants sont avant tout des requins de la finance, du commerce et des génies de la manipulation des masses grâce aux médias. C’est vraiment un roman d’actualité !

Mes lectures SF d’août 2009 : La forêt de cristal de J. G. Ballard

J’ai bien trop la flemme, en ce pâle dimanche aoutien, pour rédiger une longue et vraie chronique de lecture… 4grin Alors voici la première partie d’une petite rétrospective des romans que j’ai lu durant le mois. Tous relèvent du courant de la science-fiction et je les ai lus dans le train, chez mes parents ou chez moi, part du butin d’un vide-grenier bourguignon, grand broché ou petit poche issu de la grosse bibliothèque de Cyril qui me faisait de l’œil depuis un moment… Et pour ne pas suivre la logique je vais commencer par le dernier lu…

La forêt de cristal de J. G. Ballard

Je ne connaissais cet auteur que de nom. Sur le 4ème, on présente cet ouvrage comme étant son chef d’œuvre… Si j’avais foi en ce que les éditeurs écrivent sur le quatrième de couverture, je ne suis pas sûr que j’aurais à cœur de découvrir plus avant l’œuvre de cet auteur. Heureusement je me méfie de ce que le bon peuple a l’habitude d’encenser.

D’après ce que j’ai compris, monsieur Ballard aime à nous dépeindre des apocalypses terriennes, dans la forêt de cristal le fléau prend l’apparence d’une cristallisation qui touche aussi bien les végétaux, les animaux etc… Tout devient bijou d’autant plus qu’il est immobile ou se laisse gagner par une sorte d’immobilisme.

Les personnages luttent contre le phénomène ou l’acceptent comme une sorte de bénédiction car beaucoup semblent atteint par une dépression qu’on ne comprend pas bien. Cette langueur des personnages s’étale à l’unisson de la narration qui a ses longueurs et ses rebondissements dont le moteur tient plus de la génération spontanée que d’une réelle relation de cause à effet entre les évènements.

J’aurais tendance à dire que sous des dehors stylistiques beaux, maîtrisés quoiqu’un peu surannés, l’auteur déroule parfois sa trame « au petit bonheur la chance »… à moins que l’inconséquence des personnages, leurs réactions à la limite de l’incohérence ne proviennent de la dépression dont j’ai parlé ci-dessus. J’ai aussi eu parfois l’impression de vérités assénées : comme pour l’explication soudaine et reconnue du phénomène de la cristallisation, qu’on développe juste assez, comme faire-valoir des états d’âmes humains, mais pas assez pour une fan de hard science comme moi.

Quoiqu’il en soit, ce livre a quand même le mérite de nous faire voyager, de nous confronter avec des éléments qu’on attend pas dans la SF : la terre, l’Afrique, l’ambiance début de siècle, la lèpre, les colons, la dépression…  Il est aussi bien écrit, littéraire dans le style, ce que me plait ! et porteur de belles images, d’une dimension universelle pour ce qui est du thème, de ce qu’on devine comme morales ou idées. Mais je suis restée un peu sur ma faim, espérant une chute ou vérité finale qui aurait donné au texte un peu plus d’envergure.