Serge Brussolo est un conteur qui sait savamment faire revivre pour le lecteur les temps passés en leur donnant toute la saveur et la surprise d’une première fois. Avec La Princesse Noire, il nous emmène à la rencontre du peuple viking, post-christianisation, à une époque charnière où les anciens mythes côtoient la nouvelle religion. Inga, jeune orfèvre, incarne cette dualité, son père, ancien pillard des mers lui a enseigné ses croyances en Odin, Thor etc… sa mère convertie au christianisme, la pousse vers une vie citadine confortable, mais Inga est enlevée et vendue comme esclave à une étrange châtelaine sur une île où plus qu’ailleurs encore, on vit dans la superstition et les anciennes traditions du panthéon nordique.
Bien écrit et bien documenté, ce roman nous offre le frisson du récit d’épouvante, l’étonnement d’une bonne intrigue, ramifiée et mystérieuse, et un dépaysement assuré.
Il ne s’agit pas d’images d’Epinal, les terribles guerriers vikings à la base de nombreux récits sont ici abordés d’une autre façon : au crépuscule de leur conquête. Héros ou bourreaux, ils finiront par déposer les armes et rentrer à quai, promettant l’oubli à leurs croyances et à leurs usages guerriers.
Aussi, le temps principal de l’action se passe-t-il à terre, en compagnie de personnages aux motivations tortueuses, cruelles, dans une contrée rude où la loi reste pourtant celle du plus fort. Mais c’est aussi un récit intelligent, sensible, qui fait la part belle à cette force à vivre qu’ont les enfants. L’héroïne, à mi-chemin entre l’enfance et l’âge adulte, incarne, sans ostentation, la tolérance, l’espoir et la raison parmi des êtres marqués et influencés par les drames passés de leur existence.
Un beau récit, une belle aventure à dévorer d’une traite !