Parue dans Créatures de la nuit (Livr’s Editions) l’anthologie du Festival Etrange Grande 4, cette nouvelle de fantastique a pour cadre une maisonnette perdue dans les Abruzzes en 1945 et pour héroïne une jeune femme marquée par la guerre, le deuil et de troublantes rencontres…
Elle compte 52 000 signes et prendra place, un jour peut-être, dans mon arlésienne de recueil fantastico-italique La botte secrète.
Les premières lignes :
« L’air des Abruzzes était glacé ; sa pureté avait quelque chose de surnaturel pour la citadine que j’étais. Mes bagages à mes pieds, je tournai sur moi-même, contemplant les cimes, retrouvant pour un instant la sensation de vertiges et de nausées qui m’avait prise dans l’automobile lorsque nous entamions une nouvelle série de lacets.
Par une percée entre les conifères, je discernais les toits de Borgo en contrebas. Et, à l’horizon, comme prêt à fondre sur le petit village, la masse sombre et conique du mont Velino. Tout autour, rien. Ou plutôt si. Il y avait bien le chemin de terre que mon chauffeur avait suivi, des arbres, des rochers et cette petite maison dans mon dos, mais pour la jeune Romaine privilégiée que j’étais, habituée des escapades à Ostie, des soirées dansantes, des rues ensoleillées fourmillant de monde, la nature dans sa plus simple expression était presque invisible.
Un sentiment de solitude s’abattit sur moi et me chargea les épaules d’un manteau de froid et de désespoir. Les larmes me vinrent, comme souvent depuis la mort de Vincenzo. Au moindre prétexte, à la plus petite contrariété, mon cœur à vif pleurait encore et encore. Je savais malgré tout qu’il faudrait apprivoiser mon chagrin et le reste, car il n’y avait pas d’autre abri et personne pour me protéger… »